Extra Life



@ Grrrnd Zero Gerland, 1er mai 2011.
Africantape Festival.

Je ne peux pas dire que j'ai aimé Extra Life. Je ne peux pas dire non plus que je voulais absolument les voir, après avoir visionné ce clip.




Mais j'était très curieux, et je suis venu. Je n'avais (presque) rien de mieux à faire ce soir là que d'aller devant la scène du Grrrnd Zero Gerland dès que musiciens et techniciens commençaient à tirer les câbles, pour être sûr d'avoir une bonne place, et de pouvoir apprécier pleinement le gig ce cette curieuse formation qui répond à l'intriguant nom d' "Extra Life".


Extra Life c'est quoi ? Allé, pour les habitués des circonvolutions vocables de la scène rock pointue, on va dire que c'est du math-folk !

Pourquoi "math" ? Parce que la musique n'est que mathématiques. C'est une vérité générale. Et ici, plus particulièrement, les rythmes, ressemblent davantage à des équations complexes qu'à des figures éculées. Mais heureusement, on n'est pas (que) dans la masturbation intellectuelle. Extra Life c'est une sorte de groove étrange qui demande une écoute attentive. Un plaisir autant sensuel qu'intellectuel.

Pourquoi "folk" ? Si la bonne vieille folk est effectivement absente de la section rythmique (ben oui, pas la moindre trace de tambourin, un signe qui ne trompe pas !), elle imprègne presque toutes les mélodies du chant. Ce sont de véritables rengaines d'inspiration folk traditionnel qui se frayent un chemin sautillant à travers les structures rythmiques asymétriques ! j'imaginais très bien une formation de flûtes à bec jouant les mélodies à l'unisson. Plus étonnant encore, certains passages aux harmonies ouvertement médiévales, genre musique sacrée, chants grégoriens quoi ! Pas loin de la messe en latin !

Mais je veux tempérer cette description par "étiquettes". Parce qu'on n'est pas un assemblage de sonorité "typiques" . Au contraire de faire du style, Extra Life joue une musique cohérente, aux multiples influences, assimilées, et recréées.
Merde, ça n'a rien à voir avec Era et son trip hop de châteaux forts ! je ne me serait pas déplacé pour ça, mother fuck !

Maintenant le concert. Ah ça oui, j'étais bien placé, deuxième rang, au centre, parfait !
Grosse déception cependant, d'entrée, car la voix sous-mixée peinait à se faire entendre. Et ça, c'était vraiment, mais alors vraiment dommage ! Extra Life sans ses mélodies, c'est un peu comme un café sans sucre, ça râpe un peu !

Faut dire que notre ami batteur qui tapait plus comme un bucheron que comme un jazzman prenait beaucoup de place, et je prenais le son direct de la caisse claire en pleine face comme de gros coups de poings dans ma gueule ! Parlons en de cette grosse brute de batteur d'ailleurs ! cet espèce de bucheron qui ne coupe qu'une bûche à la fois, mais qui la fend sur toute sa longueur en un seul coup ! Autrement dit, il prend un malin plaisir à ne jamais frapper deux coups en même temps ! Il découpe ainsi le temps à la hache, et s'impose une contrainte créatrice fructueuse. Il nous donne à écouter un jeu rythmique - un langage - très particulier, dans lequel il évolue à travers de multiples variantes rythmiques qu'il déploie constamment tout au long de chacun des morceaux. Finalement c'est peut-être lui le personnage le plus intriguant de cette scène; il est fascinant, cet homme-machine, ce musicien-bourreau, cette masse qui, dans ses moment de transe, offre en guise de regard, des yeux révulsés de zombie, qui s'accordent à merveille avec son t-shirt évoquant un obscure groupe de black métal.

Notre deuxième personnage énigmatique est bien sûr le chanteur. Il joue également de la guitare folk ou du synthé, c'est selon. Je pensais que dans ce clip, il jouait un rôle pour l'occasion, mais non, c'est vraiment son personnage de scène. Tiré à quatre épingles, coiffé comme un jeune allemand dans les années quarante, ses grimaces toutes en tensions, sa voie ultra contrôlée, aiguë, sur le fil … c'est un peu tout cela le charme étrange de Extra Life. Des acrobaties vocales sautillantes, et pourtant mélancoliques, et pourtant rythmiquement pluss-qu'étrange, le tout très écoutable, presque pop ! Je ne suis pas allé voir du côté des paroles … dommage. 

Enfin, le guitariste, accoutré comme un jeune apprenti rock'n roller des années 60, chemise à carreaux, lunettes d'époque, l'allure timide, et très consciencieux. Bon, il ne m'a pas impressionné dans son jeu, mais il ajoute une dernière touche encore une fois tout à fait intrigante à cette formation à propos de laquelle, à la première approche je me suis demandé "mais bon dieu c'est quoi ce truc … merde, c'est quand même vachement bien foutu, mais qu'est ce que c'est bordel !?"

Au final, malgré le déséquilibre du son (trop trop trop de batterie dans la gueule et trop peu de notre dandy chanteur), je suis resté jusqu'au bout et j'ai réclamé le rappel ! Ce qui m'a fait rester a été la chanson "Run Cold", provenant de leur dernier EP, Ripped Heart. Elle nous a été joué dans une version monumentale d'au moins 10 minute ! Progressive, minimaliste, sans concession, l'évolution du morceau m'a fait penser aux longs crescendo de Sigur Ros, époque album blanc, dans un style beaucoup plus dur, bien sûr, mais aux vertus hypnotisantes tout aussi imparables, servies surtout par l'implacable progression des percussions, par leur lenteur, et la charge incommensurable de chaque frappe; magistral !

Je retournerais voir et écouter à l'occase :) !

http://www.myspace.com/extralifetheband
http://extralifetheband.blogspot.com
http://www.youtube.com/watch?v=Dja4b-3QwAY


Matthieu Wagon

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